À Quimper, ces lycéens font pousser des légumes entre deux cours

Ouest-France (Nelly Cloarec – juin 2019)
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Dans le vaste parc du lycée Auguste-Brizeux, à Quimper (Finistère), des lycéens ont fait de quelques mètres carrés de terre leur lieu de rendez-vous. Jardin collectif, sorties kayak : autant d’illustrations grandeur nature des cours de sciences et vie de la terre.

En préparant le carré de terre qui accueillera les bulbes d’oignons, Katel, Rachel, Samy et Maëlle butent sur une souche d’arbre. Elle grouille de fourmis. En grattant davantage, Katel extirpe une larve : « Une larve de coléoptère cerf-volant, informe Laurent Mary, interpellé par les jeunes jardiniers. Vous voyez ce que c’est ? », poursuit l’enseignant de sciences et vie de la terre du lycée Auguste-Brizeux, à Quimper (Finistère). Quelques têtes opinent. Pas toutes.

Katel, Maëlle et Samy, occupés à préparer la terre qui accueillera les plants d’oignons. | OUEST-FRANCE

Chaque vendredi après-midi, ils sont des dizaines à se donner rendez-vous au jardin, aménagé dans le parc de leur lycée. Certains passent même dans la semaine pour arroser, arracher les mauvaises herbes… | OUEST-FRANCE

Ces ados, si prompts d’habitude à extirper l’encyclopédie numérique de leur poche, patienteront avant de voir la photo de l’insecte en question. En ce vendredi après-midi, aucun n’a son téléphone. Pour mieux s’emparer de bêches, d’arrosoirs, d’une visseuse. Pour mettre les mains dans la terre et se vider la tête : « Un plaisir simple !, ponctuent Chloé et Loïc, élèves de terminale. J’adore venir. Je suis hyper heureuse quand je suis là ! », sourit la jeune fille.

Un groupe d’amis a planté du chanvre textile. Quelques semaines plus tard, ils ont semé des graines de fleurs un peu plus loin. | OUEST-FRANCE

Un plaisir simple dont profitent des dizaines de lycéens au pied de leurs salles de cours, dans le vaste parc de l’établissement public de centre-ville. « C’est le projet dont je suis le plus fier ! », lance Laurent Mary en revenant sur la genèse du jardin collectif : « Le jour de la Marche pour le climat, j’ai proposé à mes élèves de terminale de leur parler des grandes dates de l’histoire de la protection de l’environnement. »

Laurent Mary, enseignant de sciences et vie de la terre au lycée Brizeux, à Quimper (Finistère). | OUEST-FRANCE

Dans les couloirs du bahut, l’info circule. Très vite, ils sont 80 à se serrer dans la salle de classe. C’est l’engouement. La discussion s’engage. À l’heure du « Et maintenant, on fait quoi ? », les propositions fusent du côté des élèves : tri des déchets, récupération de l’eau… L’enseignant, alors, souffle une idée qu’il a en tête depuis plusieurs années : lancer un jardin collectif. La semaine suivante, trente jeunes préparaient le premier parterre, celui des fraisiers…

L’idée inspire élèves, parents, collègues profs qui glissent dans les cartables plants de potiron, de raifort ou de patates, offrent récupérateur d’eau et composteur, apportent des palettes. Justement, en ce jour de mai, un groupe de copains vient d’achever une table basse de jardin et s’attaque à la création d’un banc, sous la houlette de Glawdys. La future architecte mène son petit monde !

« Loin du bachotage »

Laurent Mary observe, passe d’un groupe à l’autre, répond aux questions (terreau ou pas, pour les oignons ?), veille à la bonne utilisation de la scie sauteuse. Il passe tous ses vendredis après-midi sur ces quelques mètres carrés de verdure. Ce passionné d’oiseaux et de jardin, de 45 ans, qui carbure aux projets est heureux d’observer ces jeunes si impliqués.

« Avec lui, on ne fait pas du bachotage », apprécie l’équipe des menuisiers. « On voit que pour lui, prof n’est pas simplement un métier. Il a la passion, assure Victor, occupé à bichonner des plants d’Oca du Pérou, un petit légume racine. Il s’intéresse à nous. Ici, on démontre qu’on peut créer des choses ensemble. »

Le jardin, clos, surplombe le terrain de sport de l’établissement. | OUEST-FRANCE

Tout juste ce que cherche à impulser l’enseignant qui envisage, à terme, de laisser la clé de la future cabane de jardin aux jeunes. Les premiers potirons auront alors fini en soupe, dégustée à la récré, et des poules auront sans doute investi l’îlot de verdure…